Quels impacts a le béton sur notre santé ?

Le Béton

Partager:
Partager sur facebook
Partager sur linkedin

Béton et santé : Quels risques ?

Même si son invention n’est pas récente, le béton s’est considérablement développé dans les années 70. C’est aussi à cette période que des chercheurs ont commencé à s’intéresser à l’impact de l’utilisation de certains matériaux sur la santé et sur l’environnement. En effet, les méthodes de construction actuelles ont fait émerger un nouveau problème : la pollution chimique et ses risques sanitaires. Le béton, qui est l’un des matériaux les plus utilisés au monde, est-il réellement sans risque ?

Introduction

Le terme pollution fait souvent référence à la qualité de l’air extérieur, aux gaz de combustion du chauffage, à l’activité polluante du transport routier ou des industries. On en oublierait presque que le choix des matériaux de construction a également un impact sur la santé et sur les émissions de gaz à effet de serre.

En effet, selon une étude de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) et de l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI) :

« La pollution de l’air est généralement plus élevée à l’intérieur qu’à l’extérieur des logements ». Toujours selon l’ANSES, entre le domicile, les moyens de transport et le travail « En moyenne, 85 % de notre temps se passe dans des environnements clos ». C’est pourquoi le gouvernement considère de plus en plus l’Analyse du Cycle de Vie (ACV) des produits. Cette question fait d’ailleurs partie des enjeux majeurs de la prochaine Réglementation Environnementale pour la construction de bâtiments, la « RE 2020 ».

Désormais, l’information sur le niveau de toxicité des produits est rendue facilement accessible à tous. Toutes les données sanitaires et environnementales du béton, ainsi que celles des autres matériaux, peuvent se consulter dans un document normalisé appelé « FDES ». Par ailleurs, l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) met à disposition des fiches toxicologiques. Ces dernières vous informent des dangers potentiels de certaines substances chimiques.

Cycle ACV du béton (source : AQTr)

Les sources de pollution des matériaux de construction

Dans le domaine du bâtiment, il n’est pas rare d’être exposé à des polluants dangereux : les Composés Organiques Volatils (COV). Les COV se présentent dans les solvants incorporés au béton, dans les matériaux de construction, dans les produits de traitement, dans les peintures, etc. Selon leur niveau de concentration, les COV peuvent provoquer de la toux, des problèmes respiratoires, des irritations nasales, oculaires ou de la gorge. Certaines substances sont cancérogènes. Par exemple, le benzène se classe CMR (cancérogène, mutagène et reprotoxique).

Les formaldéhydes sont identifiés depuis 2004 par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) comme « substance cancérogène avérée pour l’homme » (groupe 1). Ils produisent des irritations oculaires et des voies respiratoires et peuvent même être à l’origine du cancer du nasopharynx et de tumeurs pour les cas les plus graves.

D’autres sont moins nocifs, mais peuvent tout de même représenter un risque sérieux. On peut citer le styrène ou l’acétaldéhyde (classés cancérogènes possibles) ou encore l’alpha-pinène qui engendre des réactions allergiques.

Béton : quels sont les risques sur la santé ?

Selon le règlement CLP (Classification, Labelling and Packaging), les ciments sont reconnus comme « mélanges dangereux ». La fabrication du béton n’est donc évidemment pas sans risque sur le plan médical. Le degré de dangerosité, qui tend à se réduire au maximum, est variable selon la composition des constituants du béton. Les personnes les plus exposées sont les professionnels du bâtiment qui mettent en œuvre directement ces produits. Toutefois, en respectant des règles strictes de sécurité, les effets de nocivité peuvent se limiter.

Nouvel étiquetage des « produits dangereux » (source : INRS)

Les risques sur la santé liés aux constituants du béton

Les composants du béton, rassemblés en 4 catégories, peuvent être potentiellement agressifs pour l’organisme humain. Mieux les connaître et mieux les manipuler permet de minimiser leurs conséquences sur la santé.

Le ciment

L’inhalation de cette poudre peut provoquer des dermatoses allergiques. Le dosage du ciment en chrome hexavalent (ou chrome VI) et en cobalt est réglementé. Le Chrome VI est considéré comme substance cancérogène. Sa teneur doit être obligatoirement inférieure à 0,000 2 % du poids sec total du ciment.

Les adjuvants

Les plastifiants, les accélérateurs et retardateurs de prise ou encore les entraîneurs d’air sont des produits chimiques. S’ils permettent d’améliorer la maniabilité et la durabilité du béton. Pour cela une règle est à respecter : ces produits ne doivent pas dépasser 5 % de la masse volumique du ciment. Ainsi, ils ne présentent pas de risques particuliers pour la santé.

Les agents de démoulage

Ces produits permettent de séparer plus facilement le coffrage du béton durci. Ils peuvent provenir du raffinage du pétrole (huiles minérales de distillation, solvants pétroliers), être d’origine végétale (colza, tournesol, soja, etc.) ou synthétique (polybutènes, polyalkylbenzènes). Dans une optique de réemploi, ils peuvent également être issus de recyclage (huiles ou solvants de récupération, par exemple).

Les pathologies des agents de démoulage varient selon leur type :

  • Les huiles minérales, qui peuvent provoquer des problèmes cutanés et respiratoires. Des risques de cancers de la peau et du scrotum ont déjà été observés. Toutefois, ceux-ci avaient pour origine l’exposition à des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) provenant d’huiles neuves insuffisamment raffinées ou à des huiles recyclées (expositions d’avant 1975) ;
  • Les huiles de synthèse, qui ne sont pas dangereuses (sauf en cas d’inhalation), car elles ne contiennent pas d’HAP ;
  • Les huiles végétales et leurs dérivés, qui ne comportent pas non plus d’HAP et qui ne sont pas nocifs ;
  • Les solvants (white-spirit désaromatisé, kérosène et gazole), dont l’exposition prolongée peut avoir des conséquences sérieuses sur la santé, avec des maux de tête, vertiges, pertes d’appétit, irritations, etc. Les solvants de classe 1B et de catégorie 2 se classent cancérogènes ;
  • Les additifs, qui sont nombreux dans les agents de démoulage et souvent nocifs. Toutefois, ils ne sont présents qu’en quantité très faible.

Les risques sur la santé liés à la mise en œuvre du béton

Exemple d’équipements à prévoir lors de la mise en œuvre du béton sur chantier

L’INRS, dans le cadre de son dispositif de prévention de santé et de sécurité au travail, a réalisé une étude sur les risques liés à la fabrication et à la mise en œuvre du béton.

En résumé, en cas de mauvaise manipulation du béton ou sans protections de sécurité suffisantes, le professionnel s’expose à :

  • Des irritations cutanées causées par le ciment frais, accompagnées parfois de brûlures, de dessèchement de la peau ou de crevasses ;
  • Des maladies de la peau, comme de l’eczéma ou des rougeurs. Celles-ci sont dues à la présence du chrome et du cobalt dans le béton ;
  • Des inflammations de la muqueuse nasale (rhinites, par exemple), en cas d’inhalation de ciment sec ;
  • Des inflammations des bronches et des problèmes pulmonaires, en cas de respiration prolongée de poussières fines de ciment.

Les risques sur la santé après la mise en œuvre du béton

La plupart des émanations nocives s’émettent lors de la phase de fabrication et de mise en œuvre. En effet, ces étapes sont fortement polluantes et génératrices de poussières fines, de Composés organiques volatils (COV), d’oxydes d’azote et d’oxydes de soufre. Toutefois, selon l’Ademe (l’Agence de la transition écologique), la présence de ces polluants semble assez limitée dans le temps. Ces derniers restent concentrés majoritairement autour du chantier de construction.

Mais, une fois que le béton est en place, celui-ci présente-t-il un risque particulier pour la santé des occupants ou pour la qualité de l’air ? En réalité, le béton, comme de nombreux matériaux de construction, émane en effet des COV pendant plusieurs jours après son application. C’est pourquoi il est important de bien ventiler l’air intérieur pour les évacuer. Ainsi, après plusieurs jours de séchage et d’aération, le béton ne dégrade plus la qualité de l’air. Sachez également que ce phénomène de pollution de l’air intérieur intervient partout, dans les revêtements de murs ou de sols, dans les peintures, les résines (époxy, par exemple), dans les colles, dans le mobilier. Là encore, pensez à aérer plusieurs fois par jour. S’il s’agit de votre logement, équipez-vous d’une ventilation de type VMC (Ventilation Mécanique Contrôlée) pour préserver au mieux votre santé.

Les risques sur la santé liés à la déconstruction du béton et au recyclage

Lors de la démolition ou de la déconstruction d’un ouvrage en béton, des émissions de polluants peuvent[NF1]  se produire. En effet, les travaux mécaniques de démolition ou de déconstruction, le chargement et le déchargement du béton déconstruit peuvent propager des particules fines et ultrafines dans l’atmosphère. Les engins de chantier génèrent également de la pollution (gaz d’échappement).

Le recyclage du béton est également source de dégradation de la qualité de l’air pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment (tri, concassage, transport du béton concassé, etc.). Par ailleurs, certains matériaux inertes se trouve parfois enfouis dans le sol. Cette méthode se pratique par les ISDI (Installation de Stockage de Déchets Inertes). En plus de l’impact environnemental néfaste de ce type d’opération pour le sol (sol contaminé), le béton peut aussi émettre localement de la pollution atmosphérique, certes en quantité assez faible.

Les solutions préventives et sécuritaires

L’industrie cimentière a mené un travail de fond pour améliorer de manière significative la sécurité de ses travailleurs. En respectant les mesures de prévention et en instaurant des contrôles réguliers, les accidents et les maladies professionnelles peuvent considérablement se réduire :

  1. Automatiser le processus de fabrication, chaque fois que possible, pour limiter les risques d’inhalation sur le chantier. Il est possible de privilégier le béton prêt à l’emploi, par exemple.
  2. Porter une tenue de protection (vêtements couvrants, gants imperméables, chaussures ou bottes de sécurité, etc.) et des équipements de sécurité adaptés (masque, lunette, casque antibruit, etc.).
  3. Utiliser des produits moins émissifs (ciment sans poussière, ciment classé A+, etc.).
  4. Avec recours à des procédés qui limitent la propagation de poussières (voie humide, aspiration à la source, balais mouillés, tuyau d’arrosage, etc.).
  5. Des mesures d’hygiène renforcées (lavage des mains au savon neutre, changer régulièrement de tenue de travail, etc.)
  6. Application des règles d’exécution appelées « les règles de l’art » (normes DTU, réglementations, etc.).
  7. Limiter la circulation et la vitesse des véhicules à l’intérieur du chantier.
  8. Privilégier l’usage d’équipements électriques, plutôt que thermiques.
  9. Effectuer la maintenance des appareils et le nettoyage des outils et des véhicules de chantier.

Les réglementations et les normes de protection de la santé pour le béton.

Le béton bénéficie d’un cadre réglementaire très strict et très contrôlé. Plusieurs textes de loi encadrent plus spécifiquement certains produits ou certaines méthodes de travail. La transparence est de rigueur :

  • Le ciment est soumis au respect des articles R. 4412-1 à R. 4412-57 du Code du travail pour les agents chimiques dangereux. L’article R-4534-134 assure la protection des ouvriers pour une mise en œuvre du ciment, du béton ou du mortier par projection mécanique et pneumatique ;
  • L’utilisation et le dosage (<0,000 2 %) du chrome VI sont réglementés (règlement [UE] 126/2013 du 13 février 2013). Par ailleurs, l’étiquetage des ciments qui en contiennent doit se conformer à l’arrêté du 26 mai 2005 ;
  • Le décret n° 2011-321 du 23 mars 2011 oblige les fabricants à étiqueter leurs produits en mentionnant obligatoirement le taux d’émission des substances organiques volatiles polluantes ;
  • L’arrêté du 19 avril 2011 définit les Composés organiques volatils (COV) et les Composés organiques volatils totaux (COVT). Une liste présente les règles d’étiquetage (critères, classes d’émissivité, etc.) selon le niveau de toxicité des substances polluantes (selon l’article R221-27 du Code de l’environnement) ;
  • Les arrêtés du 30 avril 2009 et du 28 mai 2009 régissent les conditions de mise sur le marché des produits de construction et de décoration contenant des substances cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (catégorie 1 ou 2).

Les progrès et les engagements de l’industrie cimentière

De profonds changements ont été amorcés par les grands groupes industriels du béton pour réduire l’impact de l’utilisation de ce matériau sur la santé publique. Les syndicats, les organisations professionnelles et les experts des centres d’études et de recherches (CIMbéton, CERIB, SYNAD, UNPG et SNBPE) réalisent régulièrement des études en ce sens. Tous sont en quête de conditions de sécurité sanitaire optimales.

Étiquetage des émissions en polluants volatils (crédit photo : OQAI)

Mais concrètement, quelles sont les grandes avancées ?

Un récent rapport de synthèse (date de parution : septembre 2019) atteste de la neutralité du béton et de ses composants au regard de la qualité de l’air. Dans les grandes lignes, des analyses ont été sollicitées par :

  1. L’Association Technique de l’Industrie des Liants Hydrauliques (ATILH) au ministère de l’Écologie, pour connaître le taux d’émissions des COV de leur ciment. Les données collectées sont 10 fois inférieures aux concentrations maximales requises pour l’obtention de l’étiquette A+ « Émissions dans l’air intérieur ». Ces résultats confirment donc bel et bien que le béton analysé ne comportait qu’une quantité infime de COV.
  2. Le Syndicat National des Adjuvants pour Bétons et Mortiers (SYNAD) au CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment). L’analyse des émissions de COV de 7 types d’adjuvants (hydrofuge de masse, accélérateur et retardateur de prise, plastifiant et superplastifiant, entraîneur d’air, accélérateur de durcissement) a prouvé que la quantité des polluants était infime.
  3. Le Syndicat National du Béton Prêt à l’Emploi (SNBPE). Sur 2 essais d’échantillons de béton, là encore, les valeurs recueillies étaient inférieures à celles exigées par la réglementation.
  4. Le Centre d’Études et de Recherches de l’Industrie du Béton (CERIB). Les essais ont porté sur des parements et des dallages en béton et se sont avérés concluants.

En plus de ces analyses faites en laboratoire, le Centre d’information sur le ciment et ses applications (CIMBéton) s’est rapproché de la société Medieco pour la réalisation d’une étude directement sur site. 3 campagnes de mesures ont ainsi été effectuées. Les résultats sont unanimes : Le taux de concentration des polluants se trouve bien en dessous des valeurs-guides établies par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

Quelques chiffres encourageants

Par ailleurs, d’autres chiffres sont également encourageants :

  • L’INRS affirme que « Les cas d’affections dues aux ciments ont reculé de 76 % entre 2005 et 2015 » ;
  • Les émissions d’oxydes d’azote (NOx) générées par la combustion à très haute température des fours ont été réduites de 25 % en 10 ans. Les émissions de dioxyde de soufre (SO2) ont diminué de 3 quarts entre 1990 et 2003 ;
  • Entre 1963 et 2002, le nombre de cas de dermatoses est passé de 2 355 à 190. L’instauration d’une charte de prévention et d’information à destination des utilisateurs de ciment a largement participé au succès de ce résultat. De plus, en complément une campagne a été menée en lien avec la Direction Générale de la Santé. Cela pour accentuer la sensibilisation et généraliser les bonnes pratiques, à savoir ; Réduction du poids des sacs, campagne pour le port des gants, création d’un « label gant », etc.) ;
  • Les émissions de poussières en sortie de hauts-fourneaux ont été divisées par 25 au cours des 25 dernières années. Notamment grâce à l’amélioration des systèmes de filtrage des gaz à la sortie des fours et grâce à un meilleur stockage du clinker.

En réalité, les exemples sont nombreux et prouvent l’engagement des industriels et des professionnels du béton, de la construction et de la rénovation. Toutefois, le niveau des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie et du bâtiment reste encore bien trop élevé. Il faut poursuivre ces efforts et mettre la recherche et l’innovation au service du développement durable !

Partager:
Partager sur facebook
Partager sur linkedin
0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

NOS DERNIERS ARTICLES

La Matérauthèque

Nous souhaiterions avoir votre avis

connect

we'd love to have your feedback on your experience so far